Les phénomènes de violences commises à l’encontre des infirmières se multiplient et la communauté infirmière est encore sous le choc de l’assassinat de notre collègue, Carène MEZINO, le 22 mai dernier au CHU de Reims. Les infirmiers libéraux (IDEL), intervenant seuls à domicile, sont particulièrement exposés à ce risque, comme en témoignent les agressions relevées par la presse ces dernières semaines. Le SAIIL réitère les propositions qu’il avait faites aux candidats en campagne pour l’élection présidentielle pour améliorer la sécurité des IDEL et appelle à une modification du code de déontologie.
Pour mesurer la réalité du problème, rappelons qu’une infirmière libérale a été agressée le 30 mai dernier à Floirac (Gironde) alors qu’elle prodiguait des soins à une personne âgée. Soupçonnée d’être l’auteure des faits, la fille de la patiente a été placée en garde à vue, jeudi 8 juin 2023. La suspecte aurait poursuivi l’infirmière avant de lui donner un coup de poing.
Le vendredi 26 mai, c’est à Orléans qu’une infirmière libérale a été agressée au cours d'une visite à domicile. L'agresseur présumé qui souffre de troubles psychiatriques a été interpellé peu après par la police nationale. Il a été placé en garde à vue.Alors qu'elle venait d'entrer au domicile de sa patiente âgée, le fils de cette dernière referme à clé la porte de l'appartement, l'homme assiste aux soins avant de se rendre dans la cuisine. « Quand il est revenu, il s'est mis à me frapper dans le dos » témoigne l’infirmière, « il m’a demandé mes clés de voiture et après avoir sorti un couteau de cuisine, il me dit : je vais te tuer ».
Urgence à agir : le SAIIL réitère les propositions qu’il avait faites le 14 février 2022
Les infirmiers libéraux font partie des professionnels surexposés au risque d’épuisement professionnel. Une étude publiée en avril 2018 par l’ordre des infirmiers met en évidence qu’après la charge de travail, ce sont les violences et l’agressivité qui affectent le plus les infirmiers (57,46% jugeant important voire très important ce facteur).
Les récits des soignants recueillis par le SAIIL illustrent le fait que confrontés à des patients menaçants voir agressifs, les infirmiers libéraux ont beaucoup de difficulté à arrêter les soins y compris dans des situations où leur sécurité est en jeu. En effet, l’Article R4312-12 du code de déontologie en vigueur depuis le 28 novembre 2016 impose aux infirmiers l’obligation de trouver un confrère ou une structure susceptible de prendre en charge le patient préalablement à l’arrêt des soins, sans préjuger des situations de travail présentant un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé.
Or, dans bon nombre de cas les patients qui posent problème sont souvent connus et ne trouvent plus d’infirmier susceptible de les prendre en charge. Par ailleurs la décision de les orienter vers une structure appropriée relève uniquement de la décision du médecin traitant responsable du parcours de soins. Cette obligation d’assurer la continuité des soins afin de respecter les droits et la sécurité des malades est pleinement justifiée dans les multiples situations qui peuvent conduire au retrait d’un professionnel avec transmission des informations à un autre cabinet choisi par le patient. En revanche elle trouve sa limite dès lors que la sécurité de l’infirmier est menacée.
Le SAIIL réitère sa demande de modification urgente du code de déontologie des infirmiers pour permettre aux IDEL qui s'estiment menacés par un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé d’exercer un droit de retrait. Le droit de retrait des salariés est prévu depuis 1982 par les dispositions de l’article L4131-1 du code du travail.
Caroline Dewas, présidente