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Accord de la commission mixte parlementaire sur la loi Rist : la montagne accouche d’une souris !

Le 13/4/2023
Accord de la commission mixte parlementaire sur la loi Rist : la montagne accouche d’une souris !

Accord de la commission mixte parlementaire sur la loi Rist : la montagne accouche d’une souris !

Paris, le jeudi 6 avril 2023, la commission mixte paritaire (CMP) a adopté la loi Rist sur l’accès direct aux paramédicaux dans une version édulcorée visant à rassurer les médecins, mais au risque de ne faire que des déçus, en écartant un accès direct aux IPA, kinés et orthophonistes exerçant au sein de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

Malgré le tollé des syndicats médicaux et de l’ordre des médecins, redoutant « une médecine à deux vitesses » ou au rabais, rappelons que l'Assemblée nationale avait adopté le 19 janvier l'ouverture d'un « accès direct » des patients aux infirmiers en pratique avancée (IPA), mesure phare de la proposition de loi sur l'accès aux soins, portée par la députée Stéphanie Rist. Ce texte, adopté en première lecture ouvrait à la possibilité pour les IPA exerçant dans le cadre d'un exercice coordonné au sein de structures comme les équipes de soins, les maisons de santé, les centres de santé, mais également les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) de prendre en charge des patients sans passer par la case médecin. 

Entre 5 000 et 10 000 médecins manifestaient le 14 février dernier contre ce projet ouvrant également le droit à la primo-prescription aux IPA. L’ensemble des syndicats de médecins libéraux voyaient dans cette évolution une atteinte grave aux prérogatives du médecin traitant et une potentielle perte de chance pour les patients, alors que le gouvernement soutenait qu’elle permettrait de pallier à la pénurie de médecins dans les déserts médicaux.

Sous la pression du lobby médical, le texte fut adopté par le Sénat le 14 février, mais en des termes bien différents. En effet, pour tenter d’apaiser la colère des médecins, les sénateurs ont fait évoluer le texte dans une version édulcorée, en limitant l’accès direct aux seuls paramédicaux exerçant dans une maison de santé pluridisciplinaire, un centre de santé ou une équipe de soins primaires sous l’autorité d’un médecin.

Au final, c’est sur un texte de compromis que se sont entendus les Députés et Sénateurs de la CMP jeudi 06 avril.

Un compromis qui risque fort de ne contenter personne

Certes les médecins ont obtenu un encadrement plus strict de l’accès direct avec l’exclusion des CPTS du dispositif au profit d’une expérimentation dans seulement six départements, mais les syndicats médicaux auraient préféré l’abandon pur et simple de la proposition.

A l’inverse, les paramédicaux ne pourront que regretter le manque d’ambitions de cette version finale. En effet, dans une tribune publiée dans le journal Le Monde le 28 février, huit syndicats représentants diverses professions paramédicales (infirmiers, kinésithérapeutes, orthophonistes mais aussi pharmaciens et biologistes…) regrettaient déjà que le Sénat ait « vidé la loi de son contenu initial ». La ressource médicale, devenue rare, devait être recentrée sur les cas les plus complexes, selon les auteurs de cette tribune, en déléguant tout ce qui peut l'être.

Les kinésithérapeutes ne pourront finalement ne réaliser que huit séances sans ordonnance d’un médecin (au lieu des dix qui étaient préconisées dans le texte des députés) et ils ne pourront pas prescrire d’activité physique adaptée, comme ils l’espéraient.

La Fédération nationale des Orthophoniste (FNO) qui plaidait en faveur de l'accès direct pour tous les orthophonistes, quels que soient leur mode et lieu d'exercice, déplore que les modalités de l'accès direct dans les CPTS doivent être intégrées au projet de santé local, précisant « La FNO a exprimé à plusieurs reprises son désaccord avec cette dernière disposition, estimant que la responsabilité devrait incomber au législateur plutôt qu'aux acteurs locaux ».

L’Ordre National des Infirmiers, par la voix de son président, rappelle que l’accès direct aux auxiliaires médicaux était aussi soutenu par les associations de patients et que l’ensemble des travaux scientifiques sur les CPTS en montrait les bénéfices. « Corporatisme, insultes, menaces et désinformations auront eu raison de l’intérêt du patient (…) et notamment des 6 millions de Français qui n’ont pas accès à un médecin traitant. Là est vraiment la médecine à deux vitesses : entre ceux qui ont un médecin traitant et ceux qui n’en ont pas ».

Seuls les pharmaciens semblent trouver leur compte dans ce texte issu de la CMP. Comme le souligne Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), En premier lieu, les patients, à condition qu’ils soient atteints d’une maladie chronique, vont pouvoir obtenir le renouvellement de leur traitement auprès du pharmacien dans les trois mois après expiration de leur ordonnance. Ensuite, le texte entérine la création du DEUST de préparateurs, et avec elle l’universitarisation de ces études. Toujours au sujet des préparateurs, ceux-ci seront désormais autorisés dans le droit commun à administrer des vaccins dont la liste reste à définir par la Haute Autorité de santé (HAS).

Enfin et surtout, la CMP, sous l’impulsion des sénateurs, a rejeté le projet législatif de « Contrat d'Engagement Territorial » visant les médecins et qui aurait pu amener certains à prendre davantage de patients, faire des gardes ou exercer dans un désert médical par exemple. La rapporteure du texte Corinne Imbert (LR) s’est félicité jeudi dernier de cette suppression, rappelant que « le contrat d’engagement territorial, proposé par la Cnam, a été largement rejeté par les syndicats quelques semaines plus tard »

Partant d’une proposition de loi innovante et ambitieuse, déposée le 18 octobre 2022, au final la montagne accouche d’une souris. L'adoption définitive de la proposition de loi portant sur l’amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé est prévue le 9 mai au Sénat et le 10 mai à l'Assemblée nationale.

Rédigé par Aurélien Larisot

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